Santé environnementale : L’envers toxique du recyclage numérique en Afrique de l’Ouest

Dans plusieurs grandes villes d’Afrique de l’Ouest, comme Lagos au Nigeria ou Accra au Ghana, des quartiers entiers se sont transformés en décharges à ciel ouvert pour les déchets électroniques venus des pays industrialisés. Téléphones obsolètes, ordinateurs cassés, écrans hors d’usage : ces appareils, censés être recyclés, finissent brûlés à même le sol, souvent par de jeunes travailleurs, sans protection. Officiellement destinés à la réutilisation, ces flux masquent parfois des exportations illégales d’e-déchets.
Au-delà de la pollution visuelle et des nuisances olfactives, les experts alertent sur les effets invisibles mais redoutables pour la santé humaine. L’inhalation des fumées issues des plastiques brûlés, le contact avec des métaux lourds comme le plomb, le mercure ou le cadmium, favorisent des pathologies respiratoires chroniques, des troubles neurologiques, voire des cancers. Des études locales – encore rares – suggèrent aussi une baisse de la fertilité chez les habitants des zones les plus exposées.
Des ONG, comme Pure Earth ou Basel Action Network, dénoncent le double standard écologique des pays développés. Bien que la Convention de Bâle encadre l’exportation de déchets dangereux, des conteneurs entiers arrivent chaque mois dans les ports africains, parfois étiquetés à tort comme dons ou produits réparables. Les autorités locales, souvent peu outillées, peinent à contrôler ces flux.
Face à l’urgence sanitaire, certains gouvernements, comme celui du Ghana, ont annoncé vouloir encadrer davantage cette filière informelle et investir dans des centres de recyclage plus sûrs. Mais selon certains analystes, seule une coopération internationale plus rigoureuse et la responsabilisation des pays émetteurs pourraient freiner ce commerce toxique qui, pour l’instant, empoisonne durablement les corps et les sols.